Ici le ciel est un arbre aux racines sanglantes
Enrobé de branches aiguillonnées
Mortel est le soleil de cette terre
Mortel pour les oiseaux migrateurs
Ces oiseaux n’ont que le bec comme destination
Le sourire sauvage du vent courroucé de la fête des pâques
Des oiseaux nés absents
Nés à la porte de sortie
Nés pour fuir le pays
Le mal de ce pays est un essaim de poussières
Il se répand en vitesse sur les plus sombres frontières de notre enfance
Nous portons en nous le désir d’ailleurs
Comme une veine prolongée qui éclot notre sang de ses entraves
Ici, il n’y a qu’en fuyant qu’on puisse mériter notre survie !
Chaque oiseau migrateur d’ici
Porte des souvenirs macabres sur ses ailes tachées
De sang
De violence
D’amertume
Des souvenirs, ils en ont autant que des plumes sur les ailes.
Où iraient-ils ?
Qui sont-ils pour la terre qui les a vus naître ?
Ou encore qui étaient-ils pour cette terre ?
Là où nous irons
La mer ne sera plus une paille inopportune tombée sous la main creuse de nos yeux
Nous serons loin de Martissant
Suffisamment loin De Croix des bouquets
Ces villes de tessons de bouteilles
Où nous avons dû marcher sur la pointe des pieds pour les traverser…
Par ce qu’ici, chaque étranger-natif
Porte une enfance de papier sur le bout de ses lèvres
Le pays que nous fuyons
Toutes les saisons se nourrissent de l’écume des plantes mortes
Notre sang, nos pleurs
Tissent la toile de la rivière grise et du fleuve de l’Artibonite
Pour nous draper en noir
L’épave des miens égorge nos villes à mains nues
Le cimetière de Port-au-Prince sillonne la ville à quatre pattes
Les espèces se vengent
Ils trinquent et boivent leur nuée de rage
À la mémoire du chaos
Seule Deborah connaît le poids de la culpabilité humaine à la rue Capois
Les vieillards se font abattre avec leur tombe sur la tête
J’ai vu des morts, encore des morts étalés
Comme un paillasson à l’entrée de Port-au-Prince
Nous avons laissé derrière nous la fleur du chêne
Comme une fleur où la sève sanglote
FUYONS !
JAMAR
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