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Photo du rédacteurCretté Alexandra

Nitza Cavalier, poétesse, dramaturge, actrice, metteure en scène

Vous trouverez ici les poèmes publiés par Nitza Cavalier dans la revue Oyapock. Ces publications sont , à ce jour, inédites.





Cri Ambigu - in Révolte thème de la revue Oyapock



Ce n’est pas la manne qui tombe sur ma terre

Ce n’est pas la grâce qui émerge des nuages

Non plus ce n’est pas l’aumône qui émane du ciel

Prônant le calme la paix et les faveurs du néant

Ce n’est pas un ange vêtu de blanc qui sort de l’invisible

Ce n’est pas une colombe qui s’envole vers le bleu de l’espace

Ce ne sont ni les belles promesses de l’esprit Saint

Ni les bénédictions divines qui envoûtent ma terre

Non

Ma terre ne peut pas allaiter la vie

Son sein ne porte pas de bien-être

Ses bras ne peuvent pas bercer le soleil

Ni la lune, ni les étoiles, ni Vénus d’ailleurs

Non

Ce n’est pas la manne qui tombe du ciel

Mais des cartouches minuscules

N’ayant point de chemins précis

Elles tombent

Percent l’embouchure

Un fleuve saigne jusqu’aux os

L’hémorragie ne s’arrête point

Il pleut du sang sur ma terre

Des torrents de sang coagulent

Par la cruelle chaleur des armes

Des torrents de larmes fondent

Et partent en vapeur

Ma terre brûle de froidure

Ma terre consume le silence

Ma terre devient un calme inondé de corps

Des corps-passoire qui se taisent et qui plongent

Qui s’en vont

Par milliers et par milliers

Et encore par milliers

Et le chant des munitions ne s’arrête pas

Et les larmes ne s’arrêtent pas

Et les cœurs se taisent

Et les yeux se ferment

Et les bouches crient

Assez.



***






***


Krache San



Lalin nan pran plas li

Bouch mwen blanch

Boul je m yo soti

Près tonbe atè

M santi fènwa vle vale m

Move van pimpe m pa bò isit

Souf mwen kout

M ap veye mouche Leta

M pare menm anba djòl li

M ap tann on ti gout krache lespwa

M ap tann li di m rantre avan krache chèch

Lespwa disparèt

Lespwa fè m lennmi

Mouche leta krache bal

M rann san

De bra balan

Move van pote m ale

Mwen se « Van Mennen »


***






***

L’écarté - in Band’Illégal, thème de la Revue Oyapock


Que fais-tu ici, être-fantôme ? Cherches-tu la vie ?

Ici, il n’y a pas d’air.

Ah, comment fais-tu pour respirer ! Cherches-tu la sécurité ?

Je suis en prison.

La liberté ?

C’est une illusion.

La richesse ?

Je suis sans papier.

L’amour ?

Cette terre est dépourvue d’amour ; on n’y trouve que le mal.

Ma foi ! Que cherches-tu donc âme errante ?

Je cherche mon corps…. mon corps déchaîné… loin d’ici… mon corps d’art… mon corps aéré… mon absolu corps … loin d’ici… pour m’envoler loin d’ici !


***





***


Un morceau de vague - in Nostalgie, thème de la Revue Oyapock


Je tiens un tout petit bout

Dans ma main frêle fragile

« L’extrémité d’une vague »

Plus d’impulsion

Plus de cadence

Vague mi- morte

Ne valse plus les confusions du temps

Faufile entre mes doigts piano

Joue à cache-cache

Se métamorphose

Devient « larme humaine »

Et disparait vers le gris de l’absence.


***


Psaume sororal



A l’aube de mes souvenirs

j’ai vu cette fleur grandir

sous la flamme d’une dragonne

elle était si mignonne

et la dragonne si gaie

Au creux de mes bras

J’ai posé ma marque d’amour

Sur leur joue si fragile

Et la fleur

me crachait l’innocence

Au creux de mes bras

Fille fleur

Fille dragonne

Je vous aime



***




Mon pays comme les quatre saisons


Une nature, une nation, un pays et un peuple

un matin, un midi, un après midi et une nuit

un matin de soleil de plomb

un matin où nos mères se grillent ardemment

un matin où nos ventres gargouillent la misère de la terre

Un matin où le fleuve humain crie désespoir

Un matin où nos vie s'ensanglantent perpétuellement

Un matin de nature

Un matin sur le chemin du midi

Démon du midi

Rhétorique du midi

Feu du midi

Calvaire du midi

soleil du midi

meurtre du midi

Tours du midi

Saleté du midi

Politique du midi

Loi du midi

Décret du midi

Serment du midi

larmes du midi

Arme du midi

Vol du midi

Viol du midi

Répression du midi

Perte du midi

Saison du midi

Prière du midi

Famine du midi

Guerre du midi

Résistance du midi

Surgit alors une gouttelette de paix

qui transcende cette nation

Ce pays qui pleut ses complaintes

Ce peuple qui restera souverain

Et l'après-midi conduit à la nuit

une nuit bienfaisante

Une douce nuit d’étoiles caressantes comme un amour

Une nuit si chère dont l’ombre se luit d'étoiles

Une nuit où

la valse des arbres fait palpiter nos cœurs

Une nuit que voici

Une nuit qui brûle

Une nuit qui danse

Une nuit qui chante

Une nuit qui rit

une nuit qui sourit

Une nuit qui aime

Une nuit qui calme

Une nuit qui conseille

une nuit qui sensibilise

une nuit qui unit

Une nuit qui révolte...



***


Le Point G de Cayenne


Cris d’amour

Brillances

Arbres

Voitures

Rue

Regards

Cayenne

Plaisirs

Un vrai théâtre de moulage

Une scène cousue par la machine du désir

Ce n’est point d’un lit dont je vous parle

Mais de la chaleur du sol de Cayenne

De deux corps en fusion

Mélange de sueurs et de salives

De frissons

De tremblements

Ce n’est point d’un regard dont je vous parle

Mais des yeux par centaines

En rang

A la file indienne

Qui admirent des ébats

Des cris à l’abeille


Des rayons sensuels

Soleil évasif

Témoin des étreintes

Libido d’un orgasme

Jouissance de deux âmes

L’amour au centre de Cayenne

L’ultime désir

Trouver son point de gravité

Tourbillonner tout autour

Non

Je ne parle point des huis clos

Catimini

Cache-cache

Cachotteries de mille couleurs

Je parle d’un acte assumé

Sans honte Sans gène

Sans tabou

Sacrilège sacré

Labyrinthe de délices

Offrir deux corps en spectacle

Au rythme des regards

Franchir des portes secrètes

CAYENNE

Ville de liquide extasié.



***







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